Si des techniques de restauration existent (et a fortiori si elles ne sont pas réellement au point), il convient d’éviter leur utilisation anarchique et abusive : réimplantations de Posidonia oceanica comme alibi à des destructions liées à de nouveaux aménagements, immersion de décombres rebaptisés “récifs artificiels”, mise en place de récifs artificiels dans des sites non appropriés, etc.

Le problème se pose très concrètement dans le cas de Posidonia oceanica, en France, où des collectivités locales pourraient être tentées de contourner la loi de protection de P. oceanica en proposant des réimplantations au succès hypothétique en compensation de destructions bien réelles. Quelques principes pouvant constituer les bases d’un code de bonne conduite sont préconisés ci-dessous :

(1) le site et le biotope de réintroduction ont été autrefois occupés par l’espèce réintroduite;

(2) les causes de la disparition de l’espèce, que l’on voudrait  réintroduire sur le site, ont cessé d’agir : pollution, surpêche, pression humaine, etc.;

(3) la réintroduction ne se fait pas à proximité d’une population survivante importante (éviter de “réintroduire pour réintroduire”);

(4) les connaissances sur la biologie de l’espèce (dynamique des populations, biologie de la reproduction, etc.) permettent de penser que la réintroduction a des chances de succès;

(5) la réintroduction ne peut pas se faire en compensation de la destruction d’une population de la même espèce. Pour éviter une telle dérive, il est décidé que, dans un rayon de 10 km autour d’une destruction délibérée (dans le cadre d’un aménagement du littoral), aucune réintroduction ne peut être réalisée pendant une période de 10 ans;

(6)
le prélèvement d’individus destinés à la réintroduction ne doit pas mettre en péril la population-source.

(7) les individus destinés à la réintroduction ou au renforcement doivent provenir d’une population génétiquement identique (ou proche) de celle qui a occupé la région où est projetée la réintroduction;

(8) les techniques de réintroduction (ou de renforcement des populations) ne doivent pas constituer une nuisance pour les espèces ou les écosystèmes indigènes.

Ces propositions ont été reprises dans un document du Parlement Européen (Union Européenne) préparé dans le cadre du programme STOA (présenté à Corfou, Grèce, en septembre 1993).

Charles François Boudouresque