Cet article fait partie d’une grande série sur le thème des végétaux, peuplements et paysages marins menacés de Méditerranée. L’ensemble de ce travail a été publié en 1990 sous la forme d’un ‘Livre Rouge’ dans les Séries techniques du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (voir référence complète ci-dessous).
Description sommaire : Les rhizomes sont rampants, épais de 2 à 5 mm, avec de nombreuses racines et une feuille à chaque noeud. Des branches courtes, dressées, portant un faisceau de 3 à 8 feuilles, naissent à l’aisselle des feuilles du rhizome. Les feuilles sont rubanées, de 2 à 12 mm de large et mesurent jusqu’à 120 cm de long, avec 5 à 11 nervures ; le bord des feuilles n’est pas denté, y compris vers leur extrémité. Jusqu’à 20 fleurs mâles et autant de fleurs femelles sont réunies dans une spathe (HARTOG, 1970).
La figure ci-dessous permet de distinguer Z. marina de Z. noltii et de Cymodocea nodosa.
Distribution géographique : L’espèce est largement répandue dans l’hémisphère Nord (HARTOG, 1970) : Pacifique (Japon, USA, Mexique, etc.), Atlantique Nord (Etats Unis, Canada, Mer Baltique, Danemark, Allemagne, Royaume Uni, Irlande, Pays Bas, France, Espagne, Portugal, etc.), Mer Noire (Roumanie, Turquie).
En Méditerranée, Zostera marina a été signalée dans la plupart des pays riverains, mais dans des stations très localisées : En Espagne : Zostera marina n’est connue que des baies de Port Lligat (Cap Creus) et Els Alfacs (Delta de l’Ebre), où elle constitue des peuplements très localisés au sein d’herbiers à Zostera noltii et Cymodocea nodosa. Il est possible que l’espèce n’existe nulle part ailleurs sur les côtes méditerranéennes de l’Espagne ; les autres signalisations pourraient être dues à une confusion avec Cymodocea nodosa.
Sur les côtes méditerranéennes de France, l’espèce est abondante dans un certain nombre d’étangs saumâtres littoraux (Salse, Thau : SUDRY, 1910 ; MERCIER, 1973) ; en mer ouverte, ses stations sont plus rares : Golfe de Fos (herbier important), rade de Toulon (station très localisée : VERLAQUE et TINE, 1979).
En Italie : Zostera marina a été signalée du nord de l’Adriatique (TECHET, 1906), du golfe de Naples (FUNK, 1927 ; PARENZAN, 1956), etc.
A Malte : la seule signalisation (GULIA, 1873) découle sans doute d’une confusion avec Cymodocea nodosa.
En Yougoslavie : Zostera marina a été signalée, en particulier par ZAVODNIK (1965) et AUCIN et al. (1974).
En Grèce : Z. marina n’est présent de façon certaine que dans le golf d’Amvrakikos (PANAYOTIDIS, inédit), les autres signalisations étant douteuses.
En Syrie et au Liban : l’espèce est présente (THIEBAULT, 1953 ; MAYHOUB, 1976).
En Tunisie : Z. marina est abondant dans la lagune de Bizerte (ZAOUALI, 1980).
En Algérie : une petite station a été signalée à Bou-Ismaïl (ex-Castiglione), en mer ouverte (MOLINIER et PICARD, 1953 ; PERES et PICARD, 1958).
Ecologie : L’espèce, d’affinités froides, a de très larges potentialités écologiques en ce qui concerne le substrat (sable grossier à vase) et la salinité (de la mer ouverte à des eaux presque douces) ; en Méditerranée, elle est confinée à des biotopes infralittoraux très superficiels et abrités (étangs littoraux principalement) où elle peut constituer de petits herbiers.
Menaces : En Espagne : l’espèce a probablement disparu du Golfe de Roses (Catalogne) où elle était autrefois abondante. Dans la Baie de Port Lligat, Zostera marina est très menacée. Aux Baléares, elle n’a pas été retrouvée depuis 1921, mais il est possible que les citations anciennes soient des erreurs.
En France : Zostera marina a disparu de l’Etang de Berre à la suite de son dessalement (GOURET, 1907 ; RIOUALL, 1972 ; PICARD, 1978) ; une petite station existait à Bandol (PERES et PICARD, 1958), et a été détruite par un endigage (PERES et PICARD, 1964) ; elle se situait sous le casino actuel.
En Syrie : l’espèce subit une nette régression vraisemblablement due à la construction récente d’installations portuaires importantes (MAYHOUB, inédit).
En Algérie : il n’est pas certain que la station de Bou-Ismail existe encore.
Les stations restantes en mer ouverte sont donc extrêmement localisées et la survie de l’espèce sur les côtes méditerranéennes apparaît comme dépendante d’aménagements éventuels. De plus, Z. marina pourrait être menacée par la maladie (wasting disease) qui a déjà touché cette espèce en Atlantique.
Mesures de protection : Il conviendrait d’inclure les stations de mer ouverte dans les réserves.
Cet article est issu d’un travail réalisé pour le Programme des Nations Unies pour l’Environnement et l’IUCN par le GIS Posidonie en collaboration avec de nombreux chercheurs méditerranéens et publié en 1990 sous le titre : Livre Rouge “Gérard Vuignier” des végétaux, peuplements et paysages marins menacés de Méditerranée dans les Séries techniques du Programme des Nations Unies pour l’Environnement. 250 p. par BOUDOURESQUE C.F., BALLESTEROS E., BEN MAIZ N., BOISSET F., BOULADIER E., CINELLI F., CIRIK S., CORMACI M., JEUDY DE GRISSAC A., LABOREL J., LANFRANCO E., LUNDBERG B., MAYHOUB H., MEINESZ A., PANAYOTIDIS P., SEMROUD R., SINNASSAMY J.M., SPAN A., VUIGNIER G., 1990. MAP Technical Reports Series N°43, UNEP, Athens, PNUE, IUCN & GIS Posidonie.